Publication d’un article scientifique dans le cadre du projet Ice&Life "Future emergence of new ecosystems caused by glacial retreat"

Ecrit par Jean-Baptiste Bosson, Matthias Huss, Sophie Cauvy-Fraunié, Jean-Christophe Clément, Guillaume Costes, Mauro Fischer, Jérôme Poulenard et Florent Arthaud.

Un voyage inédit dans le futur des zones couvertes par les glaciers ou pourquoi et comment protéger les glaciers et les écosystèmes qui leur succèdent ?

L’intensification du dérèglement climatique anthropique bouleverse notre planète, générant en particulier une rapide et inquiétante fonte des glaciers. Dans un voyage dans le futur inédit pour l’Humanité, une équipe de glaciologues et d’écologues modélisent et explorent dans la prestigieuse revue Nature l’évolution des glaciers sur Terre d’ici à 2100. Ils projettent également la formation d’écosystèmes terrestres, marins et d’eau douce dans les zones qui seront libérées des glaces. Faisant partie des rares espaces naturels intacts sur notre planète, les glaciers et les écosystèmes post-glaciaires jouent un rôle fondamental pour faire face aux défis du dérèglement climatique, de l’accès à l’eau douce et de l’effondrement du vivant. Alors que l’ONU vient de déclarer 2025 comme l’Année internationale de la préservation des glaciers, cette étude montre comment l’atténuation du changement climatique et l’augmentation des mesures de protection in situ peuvent décisivement protéger les glaciers et les écosystèmes post-glaciaires.

La communauté scientifique a réalisé d’énormes progrès pour quantifier et anticiper l’évolution des volumes de glace sur Terre. Cependant, aucune analyse détaillée globale n’existait sur l’évolution future des surfaces glaciaires et sur ses conséquences écologiques. Grâce à des modélisations détaillées, une équipe franco-suisse a analysé l’évolution des 210 000 glaciers de notre planète (à l’exception des calottes continentales Antarctique et Groenlandaise), ainsi que la topographie et les températures de l’air des zones qui émergeront du retrait glaciaire d’ici à 2100.

© Revue Nature

Les principaux résultats montrent que :

Les glaciers couvraient 665 000 km² en 2020 (environ la surface de l’Afghanistan). En fonction des scénarios d’émissions de gaz à effet de serre, cette surface devrait diminuer de 22 ± 8 à 49 ± 15% d’ici 2100. Les espaces désenglacés devraient ainsi s’étendre de 149 000 ± 55 000 (la surface du Népal) à 339 000 ± 99 000 km2 (la surface de la Finlande) et seront composés de zones terrestres (78%), de dépressions sous-marines (14%) et continentales (8%), permettant respectivement le développement de grands écosystèmes terrestres (zones minérales, pelouses, landes, forêts, etc.), marins (fjords, lagons, littoraux) et d’eau douce (lacs, milieux humides, rivières). En fonction des projections climatiques, ces écosystèmes post-glaciaires seront soit de taille limitée et majoritairement soumis à des conditions écologiques extrêmes, offrant des refuges pour une biodiversité adaptée, soit vastes et caractérisés par des conditions écologiques plus favorables qui permettront l’arrivée d’espèces généralistes.

► Les glaciers et les écosystèmes post-glaciaires jouent un rôle majeur dans l’atténuation (albédo, séquestration carbone) et dans l’adaptation face au changement climatique, pour garantir l’accès à l’eau douce dans de nombreuses régions, limiter l’élévation du niveau marin et enrayer le déclin de la biodiversité. Malgré leur importance, ces écosystèmes sont encore peu reconnus dans les politiques de protection de la nature et moins de 50% des surfaces glaciaires sont situées dans des aires protégées. Les auteurs montrent comment l’atténuation du changement climatique - pour laquelle les glaciers peuvent générer des mobilisations et des actions politiques inédites, comme récemment observé en Suisse - permettra de sauver une immense partie des masses de glace sur Terre. En parallèle et en lien avec les populations locales, le développement d’aires protégées sur ces biens communs - les glaciers et les écosystèmes post-glaciaires sont principalement situées sur des espaces publics ou communautaires - garantira l’intégrité et les fonctionnalités de ces écosystèmes clés et limitera les menaces anthropiques grandissantes.

© Asters-CEN74

L’article a été publié en anglais dans la revue Nature le 17 août 2023 (DOI : 10.1038/s41586-023-06302-2). Les éléments détaillés ci-dessus proviennent d’un communiqué de presse rédigé pour la parution de l’article. Les auteurs sont pour la plupart rattachés à des structures académiques et non-académiques (Asters-CEN74) françaises et membres de la ZAA ; deux d’entre eux sont des chercheurs suisses.
Pour plus d’informations sur le projet Ice&Life, rendez-vous sur le site internet dédié : https://www.iceandlife.com/
A noter qu’une présentation du projet Ice&Life par Jean-Baptiste Bosson et Kenzo Héas est prévue lors de la journée thématique Lacs et têtes de bassins versants (10 octobre prochain) durant les journées ZAA-SDA 2023 qui se dérouleront à Annecy.

Mis à jour le 25 août 2023